Depuis mon arrivée au Burkina je n’ai pas vraiment repris d’activité sportive régulière. Bon, quand je passe le week-end à Ouagadougou, je profite de la piscine de l’hôtel Laïco. C’est super d’enchaîner les longueurs dans un beau bassin de 33 mètres, d’autant qu’il est désert le matin. Mais c’est trop irrégulier. D’autant que Marie-Claire est encore en France et que je ne rentre pas à Ouaga tous les week-ends. Un dimanche où j’étais resté sur Fada, j’ai donc décidé de marcher autour du lac pour repérer un éventuel parcours de jogging.
Je vous ai indiqué dans le premier article, qu’une digue barre la rivière qui longe Fada Ngurma et a créé une retenue d’eau de trois kilomètres et demi de long sur à peine cinq cents mètres de large. La retenue est coupée en trois parties par la chaussée submersible de la route vers Bogandé et le Nord, et par la digue de la route vers Ougagadougou et j'ai décidé "d'explorer" les deux premières parties.
Je quitte ma chambre d’hôtel à 7 heures pour profiter de la fraicheur matinale. Ah oui, j’ai changé d’hôtel. J’ai quitté le "11 décembre" fatigué par la faiblesse de la connexion internet et par la monotonie de la cuisine proposée par le restaurant. J’ai donc atterri au Panache, l’hôtel historique de Fada.
Il est tenu par une famille de chrétiens de Syrie. Comme ils sont en relation étroite avec leur famille restée au pays, le patron a mis en place une connexion internet de très bonne qualité. Au rez de chaussée, un écran plat est branché en permanence sur la télé officielle syrienne. Je vous laisse imaginer la teneur des bulletins d'informations.
Bien sûr, une chambre, même grande, à l’étage c’est moins sympa que le bungalow du "11 décembre" mais il y a une petite piscine (la seule de Fada) et le restaurant offre une cuisine bien plus variée avec, entre autres, des plats syriens. J’apprécie particulièrement le hummos et le mutabal accompagné de petits sambousheks, le taboulé. Enfin l’accueil de la famille est plus chaleureux qu’au "11 décembre". Bon la photo est trompeuse. Un effet de perspective sans doute qui embellit le bâtiment et son petit jardin.
Pour rejoindre le lac, je traverse les quartiers derrière l’hôtel. L’affiche sur ce mur de banco racole des fidèles pour un de ces nombreux prêcheurs qui sillonnent l’Afrique pour récolter de l’argent en échange de belles paroles bien mises en scène. En général, ils portent de beaux costumes taillés sur mesure, des lunettes et des montres de marque et roulent en carrosses germaniques aux vitres teintées. A en juger par la débauche de bannières et d’affiches en ville, celui-ci ne doit pas déroger à la règle.
Les rues dans les quartiers sont toujours en terre. D’ailleurs, plus on s’écarte de l’artère principale et moins on peut parler de rue. Il s’agit plutôt d’espaces plus ou moins larges creusés de trous, partiellement obstrués par des monticules de terre et de débris et où le cheminement n’est pas toujours chose aisée.
Toutes les maisons ne sont pas, bien évidemment, raccordées au réseau de distribution d’eau. Mais il y a dans les quartiers, des bornes fontaines sous la garde d’un fontainier où l’on peut se ravitailler en eau potable. Tôt le matin, les charrettes asines conduites par de jeunes garçons, se succèdent pour faire le plein de fûts qu’ils iront ensuite livrer à leurs clients "abonnés".
Il y a de nombreux arbres, soit dans les cours des concessions, soit devant. Les neems procurent ombre et fraicheur pour se reposer en fin de journée. En décembre-janvier, ils portent de petites fleurs blanches qui dégagent un agréable parfum en fin de journée. Les fruits ressemblent à de petites cerises vertes et sans noyau à l'intérieur.
L'arbre suivant, c’est un palmier doum. Pas très efficace pour l’ombre. Par contre on utilise ses palmes pour la vannerie et ses fruits sont consommés.
Même s'il y a beaucoup de motos, de nombreuses personnes, et notamment les femmes, circulent encore à bicyclette.
Mais au fil des dimanches, j'ai cherché à rallonger la ballade et je tourne maintenant à droite. Là s'étend, non plus la retenue d'eau mais le périmètre irrigué qu'elle alimente. Un système de canaux et de vannes en béton permettent les cultures maraichères, une fois le riz de saison des pluies récolté. Toutes les parcelles ne sont pas encore déchaumées. On retrouve les cultures maraichères habituelles : oignons, tomates, salades, choux et aubergines. Devant les parcelles cultivées des petits tas de crottes de chèvre et de bouses de vache sont compostées. Cela fera un bon terreau qui servira à amender les planches cultivées.
Au bout du périmètre, un maçon est en train de confectionner des briques de banco dans le lit de la rivière d'où il extrait de l'argile rouge. Le banco est en effet un mélange d'argile et d'un peu de gravillons auxquels on incorpore de la paille et du son de riz. Il faut bien mouiller le mélange pour le malaxer (souvent en le foulant aux pieds). Les briques sont ensuite moulées à la main dans un cadre en bois et mises sécher au soleil. Elles ne sont pas cuites. La plupart des cases sont construites avec des briques de terre crue.
La rivière est tarie. Il n'est donc pas difficile de traverser sont lit. De l'autre côté je trace mon chemin au travers d'une brousse de petits arbustes. Sans doute des jachères. La brousse est sillonée de nombreux chemins et en perdant de vue le périmiètre irrigué sur ma gauche, j'arrive vite aux premières habitations. Elles sont annoncées par des vergers de grands manguiers. Ils sont en fleurs et portent même de tout petits fruits.
Mon chemin débouche sur un grand espace non construit, à la lisière du village qui est à l'origine de fada N'Gurma. C'est dans ce quartier que se trouve la concession royale, le baobab sacré et les tombeaux des reines. Une dolotière s'est installée au centre de cette place. Ses canaris sont dehors. Un alignement de vieux fromagers délimite une voie.
Le dimanche, c'est le jour du marché au bétail. Il n'est donc pas rare de croiser des propritétaires qui partent vendre des animaux. On croise des cyclistes et des motocyclistes transportant des chèvres ou des poules.
A partir de là, c'est un village d'éleveurs qui s'étend sur les berges du lac. Lors de ma première visite j'y ai d’ailleurs été accueilli par un troupeau de zébus qui partent pâturer dans les environs. De belles bêtes bien portantes avec une bosse de graisse encore bien garnie. Plus loin, des groupes de vaches sont attachées à l’extérieur des concessions. Leurs veaux tètent le lait restant après la traite du matin. Celui-là est mignon non ?
Après avoir traversé le village de bout en bout et laissé la chaussée de Bogandé sur ma gauche, j’ai poursuivi le long des berges jusqu’à la route de Ouaga. Sur la droite, en partie caché par un rideau de manguiers, s’étend un nouveau quartier de Fada. Ces chaises métalliques jaunes, c’est un maquis bien à l’abri sous les manguiers. A cette heure, il était désert, mais je suppose qu’il n’en est pas de même le soir.
En retraversant le lac sur la digue que forme la route vers Ouagadougou, je découvre de belles fleurs de nénuphars blancs. J’ai bien failli finir dans l’eau en voulant m’approcher pour les prendre en photo. Eh oui, on dérape facilement sur une pente recouverte de gravillons de latérite !!!
Des gamins s'entraînent à tirer des pénaltis. J'ai adoré la tenue de l'apprenti gardien : pieds nus mais larges gants de goal et surtout une veste en basin gris, largement décousue sur les côtés pour permettre une plus grande liberté de mouvements. Classieux !!
Sur la berge j'ai retrouvé un porteur d'eau qui faisait le plein de ses deux fûts et une honorable 404 bâchée encore opérationnelle.
Cette partie du lac est la moins profonde. Des langues de terre s'avancent dans la retenue et de nombreux petits îlots sont apparus. Les crocodiles s'y prélassent tandis que des vannaux traquent les vers et insectes.
Ici pas de digue pour contenir les eaux du lac. En période de crue, elles innondent une large zone sur laquelle les villageois cultivent du riz au fur et à mesure du retrait des eaux. Aujourd'hui, c'est une large plaine couverte de chaumes dont le
Des chèvres nous regardent passer perchées sur un tronc d'arbre mort.
Personne n'a l'air de craindre les crocodiles qui se prélassent, gueule ouverte sur des rangées de dents peu accueillantes. Pourtant ceux-là ne sont pas petits. ils ont dû en croquer des chèvres imprudentes !!!
De l'autre côté de la route, j'emprunte la digue après avoir longé le Calipso. C'était la boite de nuit qui marchait le mieux à Fada jusqu'à l'ouverture, en Janvier 2014, du New Deal avec ses deux pistes de danses et surtout ses soixante girls ivoiriennes. La marche sur la digue, entre le lac et la ville est agréable. Il y a, en contrebas, de jolis jardins maraîchers
D'autres jadins maraîchers sont cultivés sur les berges du lac de l'autre côté de la digue de Bogandé.
Je découvre vite la raison de cet attroupement de vautours …. Car je tombe quelques dizaines de mètres plus loin sur l’abattoir. Les installations sont sommaires !!! Je suis scotché par le transport des carcasses à moto !!!
Ambiance plus sympathique avec ces femmes qui sont venues laver le linge dans le lac.
Je termine mon tour au milieu des jardins maraîchers. C’est l’heure de l’arrosage matinal des planches de choux, de laitues et d’oignons. Il y a aussi des bananiers et des papayers comme celui-ci.
Retour à l’hôtel par les rues au milieu des maisons en banco. Après Noël, j'ai pu réaliser que de nombreux habitants du quartier autour de l'hôtel étaient des catholiques car ils avaient construit des crèches le long des murs de leurs concessions. Comme vous pouvez le voir il y en a de toutes les formes. Certaines reproduisent une simple grotte tandis que d'autres abritent le petit Jésus dans un palais.
Petit arrêt pour regarder, quelques minutes, des courageux jouer au foot dans la poussière. Au final il m’aura fallu deux heures et demie pour boucler mon tour d’environ treize kilomètres.